ROUBAIX...
JE DIRAIS ROUBAIX aussi avec ce petit homme qui "découvre le Monde".... Cette image est comme un baiser que je pose sur son front... sur cette maison de briques, sur ces courées, sur ces sorties d'usines... Je dirais Roubaix, ses dures journées épuisantes de labeur dans le bruit des machines, dans l'infernale cacophonie des métiers à tisser,dans les départs au petit jour, dans le froid, l'humidité et la suie, dans les fins de mois difficiles, dans l'ouvrage bien fait, dans la solidarité des jours de grève, dans l'épuisante envie de mieux vivre, dans les tartines au saindoux, dans la jatte de café à la chicorée,dans e'l tarte au chuc, dans le parler chuintant, chantant, dans les rires qui sont là eux aussi, pour barrer la route à la fatigue, aux larmes... Je dirais Roubaix avec tout ce que j'ai pu graver dans la mémoire, dans le temps, dans les pavés, dans le droit fil de l'Espoir... en ce Monde à découvrir, que nous voulons meilleur...
Si je devais conter Roubaix, je parlerai aussi de ces rideaux aux fenêtres des modestes maisons... Ils sont toujours propres et beaux... Je pense que c'est une marque de dignité de la part de ceux qui les installent.... Honneur et respect comme on dit chez nous en Haïti.... Je suis à chaque fois ému... Je les contemple... Ils me rassurent...
1969_ROUBAIX- Célèbre par ses courées.... Oui, on y vit... On y dort... On y mange... On y fait sa lessive... On y compte les centimes pour arriver à la fin du mois... On paie son loyer... On paie ses impôts... On se soigne comme on peut... On est français, citoyen... électeur... Oui, on est un homme, une femme, un enfant, un être vivant ... avec son visage, son regard, ses sourires, ses sanglots, ses mains... Ses mains pour travailler, pour toucher, pour tenir... ses mains pour montrer, pour dire, pour parler, pour aimer, pour aider.... Voilà comment je dis encore Roubaix ... Roubaix d'antan et Roubaix d'aujourd'hui....
Bonjour Monsieur ! Tu vas bien ? … Nous nous retrouverons dans une cinquantaine d’année… Tu auras toujours l’appareil photo au tour du cou… La flaque d’eau sera toujours là, mais la porte sera fermée… La maison ne sera plus à nous… Les promoteurs l’auront achetée… Pour en faire quoi ? Maman travaille à La lainière… Papa est mécanicien à La Redoute… Il s’occupe des machines à emballer. Mais il s’emballera un jour lui-même… Il prendra de la vitesse et descendra aux enfers… Une longue maladie…. Maman nous quittera un soir… Mon petit frère sera chômeur et moi je bricolerai… Comment ça va depuis 1955… Ça va faire soixante ans dans deux ans… Le temps est passé vite… Je pensais que tu était mort toi aussi…
Si je devais conter Roubaix je parlerai de ces dizaines de milliers de travailleuses et de travailleurs des usines du textile... C'était une ville industrielle bruissant des bruits de voix, des pétarades des solex... Une ville peuplée de gens laborieux, courageux... Aujourd'hui les usines sont cassées... Des kilomètres de ruines... Des rues sans espoir... Et le silence pesant, étouffant, angoissant...
GRÈVE DES MINEURS DE TRIEUX
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IL Y A CINQUANTE DEUX ANS JE ME TROUVAIS À TRIEUX AVEC LES MINEURS DE FER EN GRÈVE. - C'ÉTAIT EN 1963. J'étais avec mon ami René Duchet, journaliste à la Vie Ouvrière. Nous avons passé ces "jours de fête" de fin d'année avec les grévistes en colère. Nous avons partagé leur repas de Noël, au fond de la mine... À ces hommes courageux, pour ceux qui sont encore vivants, et à leurs descendants, j'adresse l'assurance de ma profonde affection... de ma totale solidarité... Que leur exemple de dignité continue à fleurir dans cette région... Bonne année veut dire pour moi : "Espérance en un Monde meilleur et juste..." Bonne année aussi à vous toutes et à vous tous, amis de face-book, avec qui je partage, au hasard de mes archives, ces instants de mémoire...
LES CHEMINOTS
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Et si nous rendions visite à ceux qui nous mènent d'une ville à l'autre, d'un pays à la découverte du Monde, d'un rendez-vous manqué aux retrouvailles des amis, d'un endroit où nous nous sentions bien, à nos contraintes quotidiennes... Mes amis les cheminots font tout ça, de nuit comme de jour, du Nord au Midi, d'Est en Ouest, du départ à l'heure exacte, à l'arrivée improbable... D'une grève, que je proclame juste, aux voyages extraordinaires... Il faut chanter... Il faut dire... Que le Monde est petit.... et nos rencontres brèves... Que l'Histoire, dans les livres, est vaste et incertaine... Je salue ceux qui ont tenus tête au nazisme... au Capital... qui nous mènent d'un pays à l'autre...du rêve à la réalité....
©Gérald Bloncourt