RETOUR EN HAITI NOV 2016
GERALD BLONCOURT
15 NOVEMBRE 2016
À L’AMBASSADE DEFRANCE
Madame l’Ambassadeur de France,
Je vous remercie de m’accueillir ainsi que ma compagne Isabelle et mes filles Ludmilla et Morgane.
Nous sommes ici en France. Dans cette France éternelle, cette France des Droits de l’Homme, cette France Républicaine. Et, malgré les contradictions, les vicissitudes, quelques fois encore les relents d’un certain colonialisme, nous saluons cette terre d’accueil, de générosité, de courage et de liberté. Cette terre dont LE SIECLE DES LUMIÈRES a inondé le Monde.
Je remercie aussi Monsieur Jean Mathiot, directeur de l’Institut Français, Madame Mireille Perodin Jérome, et toutes celles et ceux qui ont participé à ma venue. FOCAL, le NOUVELLISTE et les autres organisations.
J’en suis à mon onzième voyage en Haiti depuis 1986. Mon dernier ayant été consacré à l’année de la célébration de Jacques Roumain avant le terrible tremblement de terre qui a ravagé le pays.
J’ai retrouvé Jacmel, mon vrai berceau où j’ai vécu jusqu’à dix ans.
J’avais peur de retrouver mon pays désespéré et abattu. Je suis ému de le retrouver debout. Je ne saurais dire à quel point j’admire son courage et sa dignité, sa créativité et ces multiples formes de dire OUI à la Vie.
Il y a trois jours j’étais à Bainet lieu de ma naissance. De novembre 1926 à novembre 2016, cela fait 90 ans que je suis au Monde.
J’ai revue la rivière Moreau aux écailles d’argent dont je parle dans un des mes livres.
Nous avons été rapidement entouré par de nombreux jeunes qui sont demeurés surpris quand je leur ai montré ma carte d’Identité où sont inscrits NÉ A BAINET EN HAITI. Elle a passé de mains en mains déclenchant sourires et regards chaleureux. Je ne peux que dire MERCI à tous mes compagnons de 1946.
Jacques Stephen Alexis, René Depestre, Gérard Chenet, Georges Beaufiis, Théodore Baker, Rodolphe Moise, Magloire St-Aude et tant d’autres.
Nous avons marché côte à côte, face aux forces de répression pour obtenir au bout de cinq jours, LES CINQ GLORIEUSES, le départ du pouvoir politique de l’époque.
Je remercie Dewitt Peters qui est à l’origine du Cnetre d’Art, Geo Remponneau, Maurice Borno ; Albert Mangonès, Luce Turnier qui ont partcicipé à cette création. J’en profite pour saluer Marie José Nadale, peintre, avec laquelle j’ai publié LA PEINTURE HAITIENNE en 1986. Il est hélas devenu un livre rare.
Je remercie toutes ceux qui ont édité notre glorieux journal LA RUCHE. Tous les étudiants de ‘époque. Aussi les populations des bidonvilles de la Saline et de Bel-air, qui ont massivement répondu à notre appel soutenant le mouvement révolutionnaire qui aspirait à une Haiti juste et démocratique, débarrassée de l’Impérialisme Etats-Uniens. Qui voulait bannir l’iniquité, la corruption et la misère.
Je remercie mes amis de l’exil, Paul Barron, Elliott Roy, Ulrich Joly, Max Bourjoly, Toto BIssainthe, Mimi Barthelemy et tant d’autres.
Tous les jacméliens , dont Gerard Pierre-Charles, Suzy Castors.
Aussi le petit mendiant rencontré en 1986 au détour d’une rue à Pétion-Ville, dont je garde encore le souvenir de ses yeux-diamants, luisants d’espérance en une vie meilleure.
Tous nos grands écrivains restés au pays, Lionel Trouillot, Yanick Lahens et tant d’autres. Ceux du Québec dont l’un d’eux Dany Laferrière siège aujourd’hui à l’Académie Française. Mon éditeur Rodnay St-Eloi de Mémoire d’Encrier, mes amis Jean Durosier Desrivières, James Noël, Robert Berrouet Auriol, Sito Cavé.
Aussi Jean-Claude Charles qui nous a quitté, et Emile Olivier.
Tous les peintres et créateurs haïtiens.
Je cite Philomé Obin, pour ne citer que lui, et qui fut au départ de l’explosion des Peintres du Merveilleux.
Ronald Meus qui poursuit une carrière admirable mêlée à une profonde solidarité auprès des enfants qu’il aide et réconforte.
Je remercie mes parents d’Haiti, de New-York, de Guadeloupe, et de Porto-Rico. Ti-Franck Bloncourt, son épouse Marie Follet, leur fils et leur fille Fudjika qui va nous rejoindre demain, venant spécialement nous retrouver de Montréal.
Je n’oublie pas Sylvie Bajeux et les membres de notre Comité qui mène le combat pour que les crimes des Duvalier soient dénoncés et jugés. Qui font connaître nos martyrs, les 60.000 victitimes d’une dictature guignolesque et sanglante et ses crimes commis à Fort-Dimanche.
À vous encore merci, Madame l’Ambassadeur qui poursuivez ici les grandes solidarités de votre pays.
Je terminerai en remerciant ma compagne Isabelle qui a fait de moi un jeune papa, Morgane, dont les 25 ans s’auréolent déjà par la découverte d’Haiti. Merci de m’avoir convaincu de revenir, car je craignais de revoir un pays triste et désemparé. J’ai retrouvé avec admiration un peuple debout, courageux et digne.
Merci à ma fille Ludmilla qui me ressemble tant. Elle est déjà conquise par sa découverte du pays et voudrait y revenir bientôt.
Je remercie toutes celles et ceux qui m’entourent ce soir ranimant en moi un amour immense en cette terre dont j’ai gardé intactes mes racines faisant de moi un arbre et ainsi que le disait mon frère de luttes et d’espérances, Jacques Alexis :
LES PEUPLES SONT DES ARBRES. ILS FLEURIRONT A LA BELLE SAISON…
Je suis de ceux, comme a pu le dire Gabriel Peri, devant le peloton d’exécution nazi, qui croit et croiront jusqu’au bout « AUX LENDEMAINS QUI CHANTENT »…
Gérald BLONCOURT